Depuis mai 2025, la LPO France, la FCEN (Fédération des Conservatoires d’Espaces Naturels) et la SFEPM (Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères) organisent des groupes de travail « diagnostics faune et bâti », avec pour ambition de produire d’ici la fin de l’année 2026 deux livrables :
- Une grille d’analyse des enjeux biodiversité dans le cadre d’opérations de rénovation du bâti, à destination des maîtres d’ouvrage, conseillers énergie, artisans, etc.
- Un guide technique sur la réalisation de diagnostics écologiques relatifs aux espèces inféodées au bâti, afin d’offrir un cadre méthodologique commun aux écologues.
L’AFIE a été sollicitée pour participer à ces groupes de travail, pour apporter les points de vue et retours d’expérience de ses membres. Elle a été représentée lors de la réunion de lancement et des deux premiers ateliers, en mai et juin derniers. À l’approche du 3e atelier (qui a eu lieu le 25 septembre à Lyon), nous avons choisi de consacrer un Midi de l’AFIE à cette initiative, en l’ouvrant de façon large aux écologues, même non membres.
Le replay de cet événement est disponible pour les membres de l’AFIE, dans l’onglet « Services aux adhérents », puis « Replay des Midis de l’AFIE ». Par ailleurs, les comptes-rendus des premiers ateliers sont téléchargeables à la fin de cet article (les prochains seront ajoutés au fur et à mesure).
Après une présentation rapide du groupe de travail et des précédents ateliers, la parole a été donnée aux participants pour faire remonter les idées, expériences et questions soulevées par ce projet. En particulier, les points suivants ont été discutés :
- A été précisé le fait que le guide se concentrera sur le diagnostic des bâtiments, et non de leurs abords. En effet, il existe déjà des publications suffisamment détaillées à leur sujet (cf. guides de la LPO, de Plante&Cité…).
- Le guide fera l’objet d’une diffusion large et sera rendu accessible à tous, mais s’adressera en priorité aux écologues par un contenu technique et méthodologique précis.
- Un retour d’expérience d’un projet dont les maîtres d’ouvrage se montraient très concernés par la question de la biodiversité, mais dont les diagnostics écologiques réalisés « en silo », par taxons et types de milieux, débouchaient sur des conclusions parfois contradictoires. Par exemple, l’implantation d’une haie à proximité d’une route était considérée dans un cas comme un habitat utile à la faune, dans l’autre comme un facteur de risque de collision dommageable aux espèces. La réalisation d’une synthèse, avec réunion de tous les experts, a permis d’harmoniser les prescriptions pour assurer leur lisibilité auprès de la maîtrise d’ouvrage. Cette nécessité de cohérence entre les différentes composantes du diagnostic sera traitée dans le guide méthodologique.
- Un retour d’expérience concernant un diagnostic sollicité par une communauté de commune, en amont d’une opération d’isolation thermique par l’extérieur (ITE). Malheureusement, le calendrier des travaux étant déjà fixé et contraint par les conditions météo, la période n’était pas adéquate pour un diagnostic écologique complet. L’un des objectifs de la grille d’analyse (1er livrable) sera justement de sensibiliser au plus tôt les porteurs de projet, afin qu’ils intègrent la nécessité d’un diagnostic dans leur calendrier prévisionnel. À l’occasion de l’atelier n°2, consacré aux méthodes de diagnostic, certains participants suggéraient de considérer tous les habitats utilisables comme étant à protéger par défaut, qu’il y ait ou non des traces immédiates d’utilisation au moment du diagnostic.
- L’intégration des Architectes des Bâtiments de France (ABF) à la démarche, ceux-ci étant parfois réticents à intégrer des compensations in-situ. Ils sont effectivement une des cibles de la grille d’analyse. Il existe des retours d’expérience de rénovation de monuments historiques qui ont su concilier les enjeux écologiques et architecturaux (cf. par exemple le compte-rendu de l’atelier 2 ou les guides techniques LPO « Biodiversité & bâti » en 2012, « Rénovation du bâti et biodiversité » en 2024). Ces exemples peuvent être utiles pour convaincre les ABF de la faisabilité de ce type de projet.
- Les espèces « indésirables » profitant également du bâti (loir, lérot…), sur lesquelles il existe actuellement peu de biblio. La question n’est pas encore tranchée de savoir s’ils seront traités par le guide : ce ne sont pas les espèces principalement ciblées, mais elles seront peut-être mentionnées, notamment pour éviter les confusions sur les objectifs des diagnostics et désamorcer les réticences que peuvent générer ces animaux pour les habitants qui en ont fait l’expérience.
- L’importance de présenter ce travail au Ministère de la Culture et aux services en charge des monuments, qui ont besoin de connaitre ces enjeux en amont et sont volontaires pour mieux les intégrer aux opérations de rénovation. Il s’agira notamment de faire de la sensibilisation auprès des Directions Régionales des Affaires Culturelles (DRAC), très en amont et pas seulement à l’échelle des projets eux-mêmes.
- La façon de présenter ces enjeux aux collectivités locales. Ce sera notamment l’objet de l’atelier 5, visant la stratégie de communication et de diffusion des deux livrables. Les documents de planification peuvent être une bonne étape pour sensibiliser, voire commencer à intégrer des recommandations (éventuellement des éléments réglementaires) dans les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU). Les services les plus confrontés à ces sujets sont les services d’urbanisme réglementaire et d’instruction des permos, qui voient passer les demandes de rénovation et d’isolation. Peu de collectivités ont aujourd’hui des postes d’écologues en interne : il y a donc un fort enjeu à former les équipes techniques. De même, il serait utile de former les entreprises qui interviennent dans les projets de rénovation.
- L’impact du bâti neuf sur les espèces protégées, notamment le bâti tertiaire fortement vitré (fort impact de collision pour l’avifaune). À ce stade, il est difficile d’imposer des prescriptions sur le sujet, que ce soit d’un point de vue esthétique ou financier, y compris pour des projets candidats à un label biodiversité. Les écologues sont souvent sollicités trop tard dans les projets : même lorsqu’il existe des solutions, des arbitrages ont été pris en amont qui ne permettent plus de les appliquer. La question des collisions sur les façades vitrées est traitée dans le guides techniques « Biodiversité & bâti » et « Rénovation du bâti et biodiversité », le CIBI a également fait une fiche sur le sujet. En revanche, le groupe de travail actuel porte sur la rénovation du bâti existant, généralement moins concerné par cette thématique.
Les prochains ateliers prévus sont :
- Le 16 octobre, en distanciel, au sujet du suivi des mesures préconisées suite au diagnostic.
- Le 16 novembre, en distanciel, au sujet de la stratégie de communication et de diffusion de la grille d’analyse et du guide technique et méthodologique.
Si vous souhaitez participer à l’un de ces ateliers, réagir aux points abordés ci-dessus, proposer vos retours d’expérience… nous vous invitons à contacter Robin (robin.chalot@gmail.com) et Alan (alan.meheust@gmail.com).